[EDITO] Les entreprises entre carottes et bâtons pour faire revenir leurs salariés au bureau

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Décidément, le retour au bureau n’est pas un long fleuve tranquille pour les entreprises. Tandis que les GAFAM dépensent des fortunes en événements et autres cadeaux pour faire revenir leurs collaborateurs sur site, d’autres jouent les surenchères dans la liberté de travail distant. Toutes sont confrontées au vide de leurs bureaux et certaines commencent à agiter les bâtons après les carottes…

Au commencement de la pandémie, Google faisait partie des premières entreprises à adopter le télétravail généralisé, suivi par d’autres mastodontes de la tech. En mai 2020, Twitter avait même annoncé que l’entreprise autoriserait le « télétravail à vie ». Mais toutes en sont revenues et, depuis quelques mois, elles s’efforcent de rapatrier leurs salariés, quitte à dépenser beaucoup d’argent en évènements divers et variés.

Ainsi, Google a prévu un concert de rap et des « pop up events », tandis que Microsoft a parié sur la dégustation de vin, les parties d’échecs à taille humaine, des tacos et du poulet frits gratuits (et tant pis pour la santé) et un cours pour apprendre à faire un terrarium (allez savoir pourquoi…). Chez Qualcomm, ambiance « happy hour » avec distribution de nourriture, de boissons en tout genre et de t-shirts. Que ne ferait-on pour faire venir les collaborateurs dans ces si chers (au sens propre comme au figuré) bureaux !

Il faut dire que les impétrants ne se pressent pas pour revenir, c’est le moins qu’on puisse dire. Selon un sondage conduit sur 5 000 salariés aux États-Unis par un professeur d’économie de l’Université de Stanford, un tiers des salariés ne veut pas du tout revenir au bureau. Les donuts gratuits et les parties de ping-pong ne font pas le poids face à une heure de transport quotidienne en moins… Au sein de l’administration britannique, le constat est encore pire. La semaine du 4 avril dernier, 61% des salariés du ministère des Affaires étrangères étaient en télétravail et ils étaient 75% au ministère de l’Education ! Même Apple est concerné. Le nombre de salariés mécontents de la décision d’imposer trois jours de travail par semaine sur site ne cesse de croître. Une communauté s’est créée pour dénoncer l’incohérence de voir le plus grand vendeur d’équipements mobiles au monde être l’un des moins flexibles en matière d’organisation du travail…

Face à cette situation, les entreprises adoptent des stratégies très différentes.
La plateforme de marketing en ligne Conductor a ainsi pris le parti du « YOLO », pour « You Only Live Once » (on ne vit qu’une fois) et a décidé de permettre à ses employés de travailler de n’importe où pendant deux mois au cours de l’année.

Au-delà du rythme hybride autorisant deux jours de télétravail par semaine, le nouveau programme permet aux collaborateurs de partir travailler où ils veulent jusqu’à deux mois dans l’année, avec cependant une limite : les périodes doivent être comprises entre la mi-mars et la mi-avril et/ou au mois d’août. Objectif : permettre aux employés d’atteindre un meilleur équilibre vie privée/vie professionnelle et de s’occuper de leurs affaires personnelles. Un moyen également d’attirer de nouveaux talents malgré des salaires inférieurs aux grandes entreprises de la tech.

Même si l’entreprise a admis que le nombre d’employés profitant de leurs mois YOLO était inférieur aux prévisions, elle réfléchit aux ajustements à apporter au plan pour le rendre plus attractif.

D’autres entreprises commencent à prendre des chemins inverses. Las de voir les bureaux désertés malgré les carottes offertes, elles commencent à agiter les bâtons ! Meta (ex-Facebook) a par exemple supprimé certains services gratuits proposés sur son campus, comme le pressing. Parfois, ce sont carrément les salaires qui sont amputés. Chez Google, les salariés qui décident de ne faire que du télétravail ou demandent à changer de bureau voient leur salaire réduit si leur nouveau lieu de travail s’avère moins onéreux que le précédent…

Le retour au bureau, on le voit, est tout sauf un retour au statu quo ante et un vrai casse-tête pour les entreprises. Il révèle également la réalité des méthodes managériales des GAFAM derrière la façade marketing et va peut-être ouvrir des brèches dont profiteront certaines entreprises plus audacieuses. La période qui s’ouvre promet d’être passionnante pour nos professions !

Toute l’équipe d’ANews WorkWell vous souhaite une belle semaine !

Lionel Cottin
Directeur de la rédaction d’ANews WorkWell

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