EDITO : Et si le bureau privatif prenait sa revanche ?

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Dans sa dernière étude « Workplace Survey 2023 », l’opérateur immobilier global Mace a évalué l’intérêt, pour les entreprises, de conserver des bureaux, et ce qu’un espace tertiaire doit offrir à l’ère du travail hybride. Sans grande surprise, il y est beaucoup question de collaboration, d’interactions et de flexibilité. Jamais d’espaces de travail privatifs. Pourtant, plusieurs arguments plaident pour une meilleure prise en compte du besoin de personnalisation de son espace de travail et pour un accès accru à des espaces privatifs. Et si, malgré les enquêtes et les sondages, le bureau privatif voyait se profiler comme une sorte de revanche ?

Bien sûr, il n’est pas question de mettre en doute ici la réalité qui s’impose de plus en plus largement dans les entreprises, à savoir l’adoption d’un mode de travail dit « hybride », alternant temps de travail au bureau et temps de travail à distance. La dernière étude de Mace confirme la tendance : 78 % des répondants souhaitent alterner un ou plusieurs jours de présence au bureau chaque semaine – le choix le plus populaire étant d’ailleurs dans ce cas plus de deux jours par semaine (44 %) – avec des journées de télétravail chez soi.

Une majorité écrasante des répondants (87 %) ont déclaré que l’interaction avec les salariés et la culture sont les principaux avantages de la présence au bureau, avec des employés et des employeurs qui sont d’accord sur le besoin de collaboration pour la motivation, la résilience et un travail hybride efficace. Ils sont par ailleurs presque 60 % à lier directement reconfiguration des espaces – pour les adapter à ce nouveau mode d’organisation – et retour au bureau. De fait, la plupart des entreprises ont déjà apporté ou prévoient d’apporter des modifications à leurs espaces de travail pour offrir une plus grande flexibilité afin d’encourager les employés à retourner au bureau : 39% des répondants ont déclaré que la configuration des bureaux avait déjà été mise à jour tandis que 27 % prévoient d’y apporter des modifications.

Tout irait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes, si ce n’était que de nombreuses études confirment l’impact positif de la personnalisation de l’espace de travail sur le bien-être et la performance des salariés, comme le confirme le dernier ouvrage de Jean-Pierre Bouchez*, directeur de recherche à l’université Paris-Saclay. Pouvoir retrouver des éléments familiers et projeter sa personnalité dans l’espace occupé pendant de longues heures régulièrement est un élément sécurisant qui renforce l’attachement, la loyauté et la performance. Un besoin difficilement compatible avec le flexoffice…

Par ailleurs, dans cette période de pénurie de candidats dans de nombreux secteurs d’activité, les demandes de pouvoir disposer de son espace de travail privatif se multiplient. Tel cadre supérieur qui explique au cabinet de chasse de tête qu’il ne changera d’entreprise qu’à condition de disposer de « son » bureau. Tel développeur « full stack » qui explique qu’il n’acceptera pas le job s’il doit « cleaner » son bureau chaque soir…

La tendance n’est d’ailleurs pas si anecdotique car les premiers articles expliquant comment recréer et gérer des espaces de travail privatifs dans un contexte hybride apparaissent dans les médias spécialisés anglo-saxons. De là à ce que le bureau privatif, certes revisité et plus modulable, ne repointe le bout de son nez, il n’y a qu’un pas. Ce serait, avouons-le, un joli pied de nez !

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Lionel Cottin
Directeur de la rédaction

* « Le travail et ses espaces », Editions Deboeck Supérieur. Avril 2023