Alors que de nombreuses directions de l’Immobilier et de l’Environnement de Travail réfléchissent à fermer certains immeubles ou certaines parties d’immeuble les jours de faible affluence au bureau afin de se conformer à l’appel à la sobriété énergétique lancé par le Gouvernement, les répercussions de ces évolutions de nos organisations de travail provoquent des réactions parfois étonnantes. Dernière en date, celle de Sylvie Charles, directrice du Transilien (groupe SNCF), qui appelle à mieux lisser les trajets domicile-travail dans la semaine…
Réagissant à une étude de l’institut BVA parue en septembre (1), la directrice du Transilien constate que, si le niveau des trajets en transports en commun en Ile-de-France (train, métro, RER) a retrouvé des niveaux équivalents à 80 à 85% de ceux de 2019, certains jours seraient bien plus saturés que d’autres en raison du choix des salariés quant aux jours télétravaillés.
La remarque ne lasse pas de me surprendre. Car si l’étude, menée avec l’Institut Paris Région, l’agence d’urbanisme régional, indique qu’il y a un écart de 18% de fréquentation entre le mardi, jour le plus fréquenté, et le vendredi, qui, cela ne surprendra personne, est le jour le moins fréquenté, ce n’est pas non plus la mer à boire. Cela signifie juste que le mardi, les franciliens doivent supporter ce qu’ils supportaient tous les jours de la semaine avant la pandémie. On ne saurait les blâmer de vouloir s’en extraire le vendredi… Une remarque d’autant plus surprenante que selon les enquêtes publiées par Île-de-France Mobilités, en juin 2022, les Franciliens effectuaient 10 % de déplacements de moins qu’en 2018.
La réaction de Mme Charles se comprend finalement mieux lorsqu’elle indique que « cela vient diminuer les avantages qu’on peut obtenir du télétravail avec des transports moins surchargés ». Son idée est finalement assez simple : en lissant mieux les jours de présence au bureau, les transports seront moins fréquentés chaque jour, et pas seulement certains jours. Ce serait plus agréable pour les usagers et, détail non négligeable, beaucoup plus pratique pour l’organisation des plannings des opérateurs de transport…
Pour enfoncer le clou, BVA s’est donc intéressé aux moyens de lisser cette fréquentation hebdomadaire. L’institut est allé demander aux salariés ce qui les encouragerait à télétravailler plus les mardi et jeudi et à venir plus souvent au bureau le vendredi. Résultats : 54% pensent qu’il faut rendre le vendredi plus attractif au bureau, 51% qu’il faudrait donner plus de souplesse sur les jours de présence et de télétravail. Seuls 23% citent le fait d’informer sur les différences d’affluence quotidienne dans les transports.
Au vu de ces résultats, on peut douter d’un changement notable à venir. Certaines entreprises ont tout tenté pour attirer leurs collaborateurs le vendredi, de la « pancake party » au déjeuner gratuit, rien n’y a fait. Quant à la souplesse sur les jours de télétravail, c’est justement cette latitude qui est souhaitée pour pouvoir télétravailler… le vendredi ! Reste donc aux services du Transilien à mieux informer sur ses affluences, sans assurance que cela change quoi que ce soit.
Lutter contre des tendances sociétales de fond n’est pas chose aisée. Encore moins quand la sobriété énergétique s’en mêle. Je crains que les équipes des opérateurs de transport en commun ne doivent se faire une raison et plutôt revoir leur organisation (et leur communication !) pour s’adapter à ces évolutions.
Toute l’équipe d’ANews WorkWell vous souhaite une belle semaine et vous donne rendez-vous très vite pour sa table-ronde intitulée « Comment renforcer l’aspect sociétal de ses prestations ? » (pour recevoir le replay en exclusivité, inscrivez-vous sur le lien suivant : https://www.agoralive-facilities.com/inscriptionReplay?k=63627ED852519).
Lionel Cottin
Directeur de la rédaction
(1) Enquête BVA pour Mass Transit Academy « Les raisons qui font du vendredi le jour de télétravail préféré », Septembre 2022